INSTINCT NOCTURNE

Écrit par Baptiste Jacquet
a été publié sous l'appellation
"Nuits Mobiles" jusqu'au
22 nov. 06 dans l'hebdomadaire

 
MERCREDI 20 AVRIL 2005_ #321
 

Dans le corps d'Alain Pacadis

Mercredi, l'exposition "Impressionnisme et naissance du cinématographe" appelle l'air océanique des vagues fracassées sur les rochers de Biarritz, filmé par les Frères Lumières et ouvrant la première salle du musée des Beaux-Arts. Les peopleux et pipoteurs institutionnels se baladent au milieu d'une scènographie brillante où projections vidéos et tableaux ancestraux se répondent à merveille. Patrice Béghain nous épate toujours avec son discours savant et piqué d'humour vachard. Michel Chomarat dragouille un bel encravaté tandis que Jacques Haffner, fatigué par son opération de la hanche, fuit ce rendez-vous entre gens pas drôles. Clignez des paupières. Depuis des mois, Super Pénélope projetait de compiler, dans un livre hommage, toutes les chroniques d'Alain Pacadis parues dans la presse. En table Chez Carlino, elle rage d'avoir été doublée par l'insignifiant Alexis Bernier de Libération, co-archiviste de Nightclubbing chez Denoël. Clignez des paupières. Ma première rencontre avec Pénélope tournait déjà autour du fantôme de cette icône rock, junké, grandiose borderliner, témoin actif dans l'histoire des mouvements punk et disco puis passionnément assassiné par son amant. "Tu me fais penser à Pacadis", me confiait-elle rapidement. Notre attachement amical tient à ce bon départ : une femme qui s'approche de moi et ne sort pas la référence habituelle et inculte du "C'est vous qui écrivez comme Èric Dahan dans Lyon Cap' ?" De retour au présent, Pénélope dévore les écrits du mauvais garçon : "Dans ses éditos, il noircit à l'extrême une époque d'incitation à l'auto-destruction. Ce qu'il décrit n'a rien à voir avec cette culture rock engagée qui veut refaire le monde... Le Velvet Underground a composé des chansons d'amour magnifiques et non des charges contre un système." Avec étrangeté dans les cils, je regarde l'emballement de ma compagne pour raconter ces histoires d'héroïne filtrée dans les veines et tous ces naufrages humains hurlants. Comment une femme si douce peut-elle s'amourer de cette époque si sombre ? Parfois, je me sens dans le corps d'Alain Pacadis. Non pas dans son temps. Je resterai, jusqu'à la fin, un de ces gosses de la techno, de ces mid-eighties kids blasés dans leurs apparats bourgeois et qui se défoncent à la bière, au MDMA ou à la cocaïne pour bien oublier dans l'amusement. La déchéance douce et sophistiquée est mon terrain d'observations et de jeux favori. Un certain cynisme est mon déshonneur. Clignez des paupières. Jeudi, la Salle Rameau couvre d'assiettes à picores les toisons vertes des billards. Pour l'ouverture du Quai du Polar, les gros fumeurs sortent le cigare et les mondains renversent de vives discussions sur leur vin blanc. Claire Carthonnet prend le bras de Patrice Béghain, à l'aise comme un serial killer en cavale. Pierre Le Magnifique défend son élongation capillaire auprès de Nadine Gelas qui ne s'engagera ni sur l'ondulé sans un seul cheveu blanc de l'avocat, ni sur le retombé de ma nouvelle moustache. "Tout est mode", dégage en touché celle qui a compris que la mode, justement, n'est pas de la suivre. Clignez des paupières après un baiser gentil à Sylvie Perret. Le ciel froid et les sangs chauffés jouent pagaille générale à Belles En Vogue lors de l'apéritif infini donné par le trimestriel Trublyon. La libido à fleur de bite m'accroche à tout gentilhomme susceptible d'assouvir une envie urgente de recollage charnel. Ainsi, les sourcils déplacés, je switche entre un bel inconnu au front dégarni et un Richard, engagement loupé depuis des ans. Aurélie Haberey et David Cantéra lèveront les drinks jusqu'à ce que cette jeunesse amusante file vers des agissements indignes. Ty Von Dickxit mixe dans le magique improbable ce qui peut bien être un Pink Floyd instrumental sur nappes de drum'n' bass à moins que l'ensemble des excès d'alcools et débordements de l'équipe du vendredi 13 n'ait déjà perverti nos rapports à la musicalité. Clignez des paupières. Les derniers insomniaques de cette grande nuit refusent de quitter Le Poulailler. Au pied des verres sans fin, Michel Essertier se repolitise et souhaite que nous votions tous en faveur de la Constitution européenne. Vincent Carry avoue qu'il votera "Oui sans bravoure". Je voterai "Blanc. Un bulletin, c'est tout." Cécile Chaffard me met le nez dans la gêne. Après l'avoir cassée dans cette chronique à plusieurs reprises, je me retrouve devant la jeune femme à présenter excuses sans regret, à avouer que je me suis trompé. Clignez des paupières. Tromper. Se tromper. Se placer dans l'erreur en suite d'une approche épidermique aux autres. Sans honte, reconnaître son tort. Je ne renierai rien de tout ça. Clignez des paupières. Vendredi, en début de jour pluvieux, je vide mon cerveau à l'étage de L'Apothéose. "Lorsque je me masturbe, je pense souvent à ta bite", se contre Xavier sur mon torse. Ce multishot d'afters se glisse sous les draps du lit en appartement et ne m'embrassera jamais. Tant mieux pour un amant si prenant. Fermez les paupières.

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MERCREDI 27 AVRIL 2005 _ #322
 

It should be hard. But we would be slow

La Drôlesse prévient qu'elle n'étirera pas la nuit jusqu'à un extra-bal au Hang'Art. Jeudi, la nouvelle salle à sauteries du septième arrondissement dresse un parterre de kids qui honore, d'énergies et bonnes sensations, la soirée Kiss My Music avec le Canadien Tiga en spin doctor qualifié. Au comptoir à tout boire, Antoine S. place son visage bronzé au Cap Vert sous un spot bleu et raconte son histoire de chien étranger : "Dans la chambre d'hôtel, un cabot s'est couché près de moi sur le lit. Je l'ai caressé sans méfiance jusqu'à ce qu'il se branle tout seul puis éjacule. Je n'avais jamais vu un chien éjaculer." Clignez des paupières. Par beats housy frappés, un couple de militants homos déplore le manque d'actions festives du milieu association local et fantasme de nouvelles formes de combat pour la cause pédé. Je grille une Merit et souffle mon détachement à ces dires de gentilshommes bien trop ferraillés dans un communautarisme chiant : si je dois m'accrocher à des engagements actifs, ceux-ci sont (seront) d'abord la défense d'une liberté de vies, de sexualités et de sentiments. Je n'ai jamais cru que mon homosexualité était à défendre. Elle est juste à vivre et, effectivement, à faire valoir. Tout comme ces êtres "faibles", les femmes. Sur l'écran du portable, Super Pénélope donne écho à cette raison : "Selon le nouveau pape, c'est à cause des femmes que les pédés existent. Du coup, je retourne faire la vaisselle. Toi, tu as intérêt à te repentir avant de retrouver le droit chemin de géniteur." Clignez des paupières. Patrick P. croit avoir perdu un kilo à la suite de son dernier week-end barcelonais : "Nous passions d'une fête à une autre sans manger et dormir. Trop bien." Lorsque Tiga s'amuse avec nos jambes, Rico se grime de son traditionnel visage-râle : "Il mixe 99% de tubes. C'est un peu facile." Je charge le dj lyonnais : "C'est pro, propre et bien. Combien de dj's jouent des misères en voulant frimer avec une musique relativement pointue ?" Clignez des paupières. Vendredi, nous aurions pu nous abstenir d'inaugurer L'Oblic, nouveau bar obscur, situé en lieu et place du regretté Mushi-Mushi. Une vipère crache le venin : "Quand je vois la clientèle pourrie qui est ici, je pense que je n'y reviendrai pas souvent." En trinque au milieu de trois branchouilleux habillés en rose ou coiffés d'un cheveu pas vraiment sale, Emma et Prousty nous sauvent de l'ennui profond avant de prendre le volant pour Dijon. Clignez des paupières. La Vapeur arrose ses dix ans d'un concert couillu et bestial des LCD Soundsystem. La salle gronde des riffs de guitares à vouloir gratter le plafond avec nos ongles rageurs. Des bleeps se perdent dans le choc d'une batterie concassant des beats monstrueux. La voix se diffuse nonchalante jusqu'à huiler les muscles d'un public pas très sage. En rappel sur "Yeah Yeah Yeah", les New-Yorkais avancent leur hymne bêta telle une spirale vicieuse : début lent et langoureux pour manipuler un tourniquet sonore jusqu'au chaos final. La claque. La Drôlesse m'offre un seul drink afin de préserver ses chances d'un bon retour autoroutier sur Lyon. Elle file au plus près de la scène, le regard sur les doigts de Vitalic. "It should be hard / But we would be slow", robotise la voix synthétique d'une pimpo a capella. La nouvelle icône mondiale de l'electro attrape aussitôt corps et songes. La sueur lustre nos visages en sourires brillants. Les têtes se tirent au ciel comme tenaillées par les sons robotiques et sexy pianotés par le Dijonnais. Les cerveaux ne répondent plus aux stimuli de la pensée. Ils sont happés par la chair technoïsée. Nous hurlons des "Youli !" alors que les plus excités montent sur la scène et entourent le magicien encravaté. Clignez des paupières. "Il faudra lui dire que, pour Nuits Sonores, son live devra durer plus d'une heure. Là, ça ne va pas. C'est trop court. J'en veux encore, encore", grogne La Drôlesse dans la voiture. Enfin, nous versons chacun une larme de ne pas avoir réussi à "coucher avec Vitalic" avant de cligner des paupières. Samedi, le basement du DV1 brûle sous l'effet de clubbers surexcités et en transe sur un mix cheesy et kilométrique de Miss Lucy. Drunky et presque indigne, Christophe Boum ne prête guère attention à la porn-star se tripotant la queue devant des kids voyeurs. Le bel homme veut me convaincre de voter "Non" au prochain référendum sur la Constitution Européenne. Ses arguments perdus, je lui garantis qu'en votant "Blanc", j'accepte de donner ma voix au camp le plus fort. Clignez des paupières. En matinée, L'Apothéose est impraticable. Les insomniaques comatent sur la moquette en étages par petits groupes. Sur les canapés, des couples se déboutonnent et se sucent. Les cabines à baises se visitent à la chaîne. Les verrous s'ouvrent. Les portes se ferment. L'incorrection amusante se poste au comptoir et la fatigue m'appelle. Fermez les paupières.

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MERCREDI 04 MAI 2005 _ #323
 

Au volant d'une Cadillac rose

Je prévois de ne pas sortir pendant une semaine, juste pour tester ma résistance à l'appel nocturne. Évidemment, le manque se fait sentir. Je ne tremble pas mais fume plusieurs paquets de Merit, textote des bons mots à Andréa ou reprends la lecture de quelques chapitres de cette bible définitive, Last night a Dj saved my life, écrite par Bill Brewster et Franck Broughton. Clignez des paupières. Une angoisse sans détente comprime mon thorax. Sans ménagement, je pique des idées sombres dans la tête. Je pourrais presque écouter à fond Mon cerveau dans ta bouche de Programme. C'est écrire si je me sens mal. Alors, jeudi matin, tout s'éclaire : une date pour souvenir mortel vient de marquer le calendrier. C'est impressionnant à quel point le corps peut être tatoué, à vie, par une date traumatisante. Sans cultiver ce mauvais anniversaire, la chair transpire automatiquement de son arrivée. Clignez des paupières. En soirée, Super Pénélope s'installe en terrasse du Baryton et ne semble toujours pas sortie de son bouquin maléfique sur Alain Pacadis : "Dans une de ses chroniques, il explique son arrivée à un concert en banlieue parisienne : au volant d'une Cadillac rose, avec sa bande de junkés à l'arrière, il se gare juste devant la MJC de Cergy-Pontoise et fait son cirque grandiose", et se désole : "Qu'est-ce que je regrette de ne pas être née plus tôt ! Les gens avaient au moins du panache." Entre deux drinks légers, nous forçons la marche arrière de la nightlife dans ces souvenirs lus et entendus qui touchent à l'époque grandiose du Palace parisien : des minets ouvriers assis près d'Hemingway, de l'argent balancé à perte dans des fêtes majestueuses. Et nous plantons là, sous les premières chaleurs, dans notre quotidien tiède et un avenir de compromis. Clignez des paupières. Vendredi, je cède à l'invitation lancée par Cart One pour un souper express au Café 203. L'artiste fait la promotion de ses "lapinoux qui s'enculent", illustration du flyer de la soirée De La Break au Rectangle, jeudi 5 mai dans le cadre des Nuits sonores. "Ils plaisent beaucoup aux filles", continue Cart alors qu'Anne LS stoppe son vélo à notre table fixée en plein ciel clair. La demoiselle de beadoa.org sort quelques peaux de loup, cartons d'invitation pour l'apéritif Freaks 5555 qui rameutera les enragés à L'Escalier (8 rue de la Platière, quartier Terreaux), ce même jeudi 5 dès 19h30. Un plat dans le ventre et plusieurs drinks dans la gorge désordonnent un débat à plusieurs degrés d'alcool sur "le déshonneur contemporain" et, plus sûrement, griment nos regards d'un premier voile d'indignité. "Je veux me prendre une tôle", prévient Cart en chemin pour La Fée Verte. Clignez des paupières. À l'entrée du bar à mixes, je préviens que "s'il n'y a que des pentards à dreads, moches et pas amusants, je ne reste que cinq minutes". Sauvé par une bande de mauvais garçons drunky et jolis, je descends ce Nuage fort qui arrache la gueule. "C'est comme à l'époque où nous allions à La Marquise", bascule Z2 son verre jumeau et flambant. "Tu as vu ma nouvelle veste de vernissage ? Elle est chouette. Non ?" crâne-t-il en pivotant vers l'escalier du sous-sol tel un mannequin désarticulé et en cintre de rayures noires striant un coton blanc. Sur la piste écrasée par un bas plafond multicolore, un bel étudiant me laisse plaquer la boucle du ceinturon sur son fessier en balancier sur les roulements de beats "nervaas" fabriqués par dj Flore. Toujours aussi adorable, la star nous annonçait, quelques jours plus tôt, l'ouverture de son website à petites fleurs orange : www.flore-music.com. Clignez des paupières. À L'Ambassade, devant un serveur "vavavoum", Z2 fait la cour à une nymphette douce. Plus tard, il sautillera : "Elle m'a donné son numéro de portable. Trop content." Jean-Philippe Duclos poursuit l'inauguration de son nouveau bar, Le Tribeca, et arrose nos glaçons de Vodka Get. La nuit coule dans le son des platines maîtrisées par A Jackin' Phreak et Rico. Ivre, je file biser Colette au Medley puis rampe jusqu'à La Jungle, bordel qui n'est plus ce qu'il était. En cabine d'essayage, trois serial fuckers entreprennent un coup de bites rapide. Je me joins à l'attelage afin de goûter le plus excitant du trio malformé : un quadra chauve puant le sexe à pleins clignements de paupières. En appartement, ma proie ôte ses vêtements, se colle à ma queue en cherchant le coït au plus vite. Je m'exécute avec violence et détachement. Objet trouvé, l'homme quitte le lit, se rhabille et claque la porte d'entrée. Je souris. Les draps se moquent d'avoir encore à se souvenir de ce nouvel acte masturbatoire. L'oreiller retend son rebondi et assouplit ma tête qui se laisse perdre dans la non-envie. Rien ne m'est nécessaire en ces jours. Alors, je ferme les paupières dans l'espoir d'un grand jeu d'amusements à ces Nuits Sonores qui arrivent dans mes bras.

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MERCREDI 11 MAI 2005 _ #324
 

Agoraphoniques

Fausses politesses, gentillesses mondaines et embrassades se multiplient à mesure que le soleil se planque derrière la colline de Fourvière. Mercredi, les os durs de la piscine du Rhône, joyeuse sous ses dorures jaunes, couvrent l'inauguration du festival Nuits Sonores. Dans ce pince-fesses select, plus le compteur à "Bonsoir, ça va ?" tourne vite, plus la frime gonfle l'ego. De cette concentration "peopleuse", nous bisons les sincères : David Cantéra dans un coordonné prêt-à-danser, Marie-Stéphane Guy en amour pour son combi Volkswagen seventies, OLB qui joue le bourru sexy en échange avec Thomas Charrondière, gentilhomme "vavavoum" et mal rasé. En pleine terrasse fraîche, A Jackin Phreak huile les premiers déhanchements du futur marathon musical dans une mixture disco et acid-house chic. Clignez des paupières. Déjà aux Subsistances, une fourmilière de danseurs s'approprie tous les pavés. Chaudement assoiffés, nous pistons le geyser de minimal house jaillissant de la cour carrée. Steve Bug s'incruste dans les jambes gentiment avant de faire place à un Mathew Jonson, jeune Canadien incapable de produire une musique cousue de sens. Nous ramons au bar avant de subir l'autoroute droite ouverte par Richie Hawtin. Le souffle linéaire des basses nous force à faire halte interminable dans Custom Transit, fabrique ambulante de bonnes sensations. Clignez des paupières sur une nuit étourdissante mais, musicalement, sans relief ni saveur. Jeudi, les mécréants de PMP font une descente à l'apéritif Freaks 5555 et balancent sur la terrasse des gélules d'antidépresseurs et des tracts vengeurs contre Anne LS. Le happening aère L'Escalier en surnombre de borderliners et expatriés parisiens tarés. Patrice Béghain redécouvre le goût âpre et sucré d'un Campari puis s'initie au langage électronique avec Eric Boulo, Nick V des soirées Otra Otra et La Denise, en équilibre entre mondanités précieuses et disjonctions ridicules. Clignez des paupières. Le Rectangle est devenu sauna irrespirable lorsque Gaelle Communal me saute au cou à minuit. La belle offre un visage lumineux, juste reflet de l'énergie fabuleuse qui bordélise la soirée De La Break. Clignez des paupières. Une file d'attente, copie conforme à tous les sites du "Circuit électronique", s'étire devant le Loft. À l'intérieur du club, The Hacker irradie les kids clubbers d'un live acid-house en flirt avec la perfection. Emma et Christian Jeulin se faufilent dans la sueur tenace à pas bondissants puis clignent des paupières. L'hystérie collective s'interrompt au Rectangle lorsque Le Flambeur toaste sur le classique Original Nuttah de Shy Fx and Uk Apachi. Nous flashgordons, à vélos ivres, vers un DV1 incouchable et transpirant avant de pédaler dans une boulangerie et hurler une commande gourmande. Clignez des paupières. Vendredi, il pleut des confettis multicolores sur les épaules de Pierre David, Gilles Pastor et Patrice Béghain en chaloupés dans la rue Royale. Le plein ciel brille de beaux gosses et jolies faces en plaisir sur une deep house sensuelle et communiante. Clignez des paupières. En apéritif à la piscine Madchester, Mike Pickering plaisante avec l'air fluvial sur une offrande de dance music typée "Ibiza à Lyon". Aux premières notes des clochettes hypnotiques du Muzik X-press par X-Press 2, les bras nous en montent férocement et nous font toucher le grand instant magique. Clignez des paupières. À 3h30, les Salins du Midi perdent une masse conséquente de convives. Arrivé sur le tard, je n'entends rien et bois la nuit en coupes de champagne et piques insultantes sur un journaliste de Trax, homme blanc aussi fade que son magazine électro. Greg de Jarring Effects goûte ces bulles de moquerie avant de cligner des paupières sur un plein jour nouveau. Samedi, La Drôlesse a perdu sa voix à force de crier pour danser. Au centre nautique, nous assistons à la révélation musicale du festival : le duo Riton (photo) claque les beatboxes et déjoue le classicisme en triturant, à coups de guitares rocky prétextes, des sonorités ultramodernes et d'avant-garde. Une très grosse baffe dans la gueule et un clignement de paupières. Lorsque Bugge Wesseltoft éteint son ciel zen en afro-jazz, Mathew Herbert prend contrôle de tous nos membres. Aux Salins du Midi, le dj-producteur s'ingénie marionnettiste et secoue nos mains d'un côté, bascule nos bustes de l'autre ou tord nos jambes à en perdre l'équilibre. D'un mix vagabond, il nous manipule avec des ficelles transparentes incassables. Là, Perrine Lacroix et Claudius éclatent de rire. Super Pénélope se frotte à mon poitrail. François Verdet cligne ses paupières heureuses. Plus tard et pour plus épuisant, Vitalic compacte une foule délirante et volontaire sur des échappées hyper-robotiques et sexuelles où il faut se tripoter les muscles pour être sûr que l'on est toujours en vie. Clignez des paupières. Dimanche, les grands insomniaques narguent le soleil des Siestes Sonores au parc de la Visitation avant de tourner dans des dires absurdes à Ma Campagne lors d'un final privé. Blandine Chrétien prétend enfin qu'Agoria "a une très grosse queue" puis pousse dans son Kangoo rouge Dj Poulet, Cricri et La Drôlesse pour une descente sur terre surréaliste. Fermez les paupières.

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MERCREDI 18 MAI 2005 _ #325
 

Appelez-moi Paris Hilton

Elle commence toujours par me faire culpabiliser de ne plus interrompre sa solitude de vieille finissante. Comme si j'étais pour quelque chose dans ses erreurs passées. Ma grand-mère paternelle est une splendide idiote, de celles qui se terrent dans la brutalité en fond de campagne et n'aiment rien d'autre que leur ego atrophié. Elle souffre de ne pas être encore morte et que personne ne se soucie, dès maintenant, du comment sa dépouille sera enfoncée dans le caveau familial. Clignez des paupières. Depuis quelques années, j'ai débranché cette machine à hérédité qui tambourine le sang de ses accidents mortels en série, ses handicapés végétatifs et ses suicides réussis ou ratés. Je pourrais écrire une saga tragique sur ma famille. Mais je préfère l'oublier. J'ai mieux à faire avec l'avenir. Clignez des paupières. Jeudi, Patrice Béghain s'installe en terrasse du Nord et manie sel et poivre sur une assiette de saumon frais. L'homme me plaît car il se croche à une sophistication délicieusement mitterrandienne et pose un regard détaché (parfois enfantin) sur les petites choses de la vie. Mes proches prétendent que je ne fréquenterais pas l'adjoint s'il n'était qu'un mondain anonyme, ou que mon image d'intégriste "underground" ne colle pas avec ce type de rapprochement avec pouvoir municipal. Clignez des paupières. Je suis honnête. Trop honnête. Clignez des paupières. À L'Escalier, Vincent Carry déguste la grande réussite des Nuits Sonores avec Super Pénélope. En liquidation d'un troisième verre de Campari, je tente une discussion pacifiée avec le coordinateur du festival. Depuis notre première rencontre au Vertubleu, notre relation repose encore sur : "Je comprends ce que tu veux me dire. Mais je ne veux pas en parler." Nous sommes, tous deux, chien et loup avec des crocs qui saignent. En sortie de bar, au volant de sa voiture, Pénélope raidit un sourire suite à une affaire privée : "Nous vivons entourés de présumés amis incapables de dire les choses en face parce qu'ils sont tous totalement immatures." Clignez des paupières. Un long baiser pour l'anniversaire d'Aurélie Haberey à La Fée Verte me porte à L'United Café. Envie de me taper un mec sans le courage de séduire. Je me branlerai finalement en force puis grincerai des dents jusqu'au lever du jour. Clignez des paupières. Vendredi, La Drôlesse part tester la nouvelle bière de luxe (sous l'appellation peu flatteuse de "La Bapjac") à l'apéritif mensuel du collectif Dopebase. En retard d'horloge, je retrouve la jeune femme au before des Vendredi 13 qui sonorise la Buvette du Pont Wilson dans un bordel joyeux sur trottoir piétiné. Entourés de tous les borderliners et méchants freaks de la ville, nous tirons à bière pressée sur nos têtes de Turc du moment. Entre "On ne tire pas sur une ambulance" ou "Elle tombera toute seule sans que l'on s'en occupe", nous excellons dans la méchanceté. Marie Rigaud en prendra pour son grade. Clignez des paupières. À trop rire, Cécile Chaffard soutient Emma dans son entreprise de "Je suis Jennifer Lopez." Cart One essaie de me consoler après qu'un alcoolique m'ait annoncé que "Paris Hilton a tourné un film porno : A Night In Paris." Je crochète un Steve, grand gaillard aux fesses fermes avant de cligner des paupières. Un hangar du squat RVI s'ouvre sur un cirque délimité par des bougies blanches. La nouvelle soirée des Vendredi 13 invite porteurs de lunettes noires et femmes à frou-frou en plumes. Cécile s'élance dans une danse des yeux doux sur Yves Caizergues, déjà au bras d'une blonde "aux seins siliconés" selon les dires d'une jalouse. Patrice Moore reborde la piste de danseurs dissipés par un mix early house amourable. La Drôlesse se colle à un amant possible avant de m'encastrer dans la voiture du Goldenboy de PMP pour un retour en centre ville. Clignez des paupières sur ce morceau nocturne grandiose. Nous rions beaucoup moins à la porte du DV1 où les videurs nous signalent que notre état général n'est pas acceptable. Je souhaite parlementer mais tout nous éjecte du club. Bien décidé à faire le deuil de cette disco fabuleuse à la sélection d'entrée toujours plus hasardeuse, je cligne des paupières dans une posture indigne à L'Apothéose. Londres, Paris et New York sont les capitales mondiales du clubbing et des mouvements musicaux qui l'agitent. Selon un cycle assez routinier, une de ces trois mégapoles prend de l'avance sur les deux autres. Aujourd'hui, New York est en pleine vogue. Samedi, nous vérifions la suprématie américaine pendant le concert de Bloc Party, groupe briton agréable sur disque mais ennuyeux sur scène. Le public du Transbordeur réagit mollement aux tentatives de tout casser, entreprises par quatre jeunots dans le mauvais sens du vent. Lorsque les New-Yorkais de l'écurie DFA dynamitent nos jambes (The Rapture ou LCD Sound System), les petits Anglais déchiffrent, en besogne, le son de Joy Division. "London is not calling." Fermez les paupières.

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MERCREDI 25 MAI 2005 _ #326
 

Coincé

Le journaliste de France Culture me demandait si je connaissais "des mondains, des jet-setters (sic) locaux" et si je souhaitais porter la contradiction à Gérard Collomb lors d'un débat sur Lyon, "ville internationale ?" Clignez des paupières. Lundi en huit, la messagerie enregistre sa relance. Impoli, je ne donnerai aucune suite à l'invitation : de peur que le tableau se colorise comme une émission tragi-idiote animée par Stéphane Cayrol sur TLM (contraction de "Tellement Mieux" chez les moqueurs). Par méconnaissance du caractère "international" de cette ville. Clignez des paupières. Depuis le pont Wilson, des lances de ferraille rouillée se plantent dans l'eau du Rhône, en bord de quai. Quelle allure auront ces berges végétales dans quelques années ? Ressembleront-elles à des "ramblas" pour petits vendeurs de cartes postales et flâneurs d'un instant ? L'avenir du plus beau chantier de la Municipalité m'enthousiasme. Il rehausse toute la beaufitude communiquée sur le futur centre commercial du Confluent ou le coût pharaonique, pour un impact économique aléatoire, de la Salle 3000. Clignez des paupières. Je n'ai jamais été bon critique avec Monsieur le Maire : il transpire le politiquement tiède et le manque de bravoure. Il désire, peut-être, rester des années dans son fauteuil à l'Hôtel de Ville, comme ces édiles d'une autre époque. Il accompagne cette mauvaise impression d'une ville bastion de petits notables et commerçants. Tout ce qu'elle n'est presque plus. Pour résumer à cru, Gérard Collomb m'emmerde alors que Lyon s'amuse malgré lui. Clignez des paupières. Mardi, nous jouons les bénévoles au sein de l'association Rhose lors de la première Journée mondiale de lutte contre l'homophobie. Christophe Cédat nous donne des cours de conduite de Peugeot 203, complétés d'une moquerie appuyée : "Pour écrire des saloperies sur les gens, tu es fort. Là, au volant, tu fais moins le malin." Enfin, toute la journée, nous circulons dans ces voitures anciennes, les plateformes arrières dressées de photos d'insultes anti-homos qui se taguent quotidiennement sur les murs des proches banlieues. Clignez des paupières. La nuit refroidit en terrasse du Café 203. La Drôlesse trinque une anisette avec Christian Jeulin, tout excité à l'idée de nous accompagner au Sonar barcelonais. Primabella et Christophe Boum basculent les drinks à mesure que mon torse se raidit et grelotte. Philippe ne comprend toujours pas mon casque capillaire, millésimé "1978". Je crâne et frise ma moustache avant de prétendre à une pose, très hypothétique, en couverture de Butt Magazine, afin de m'ouvrir toutes les portes de la branchaga internationale. Puis en rajoute : "De toute façon, dans six mois, tout le monde passera sous le Babyliss pour un brushing matinal." En fin de cette onéreuse action de militantisme gay, Patrick P. recrute de nouveaux adhérents entre deux bières et quatre cigarettes. Accroches loupées, nous clignerons des paupières encore un peu plus pauvres. Mercredi, la machine à respirer se coince. Frissons, rafales de toux sèche et courbatures signalent que je resterai souffrant sous mes draps. Le paquet de Merit me nargue. Je fume. Un effervescent bulle dans le verre. Froid-chaud. Chaud-froid. En paiement de tous mes excès, la fin de semaine défile sur un portable au pied du lit. Samedi, La Drôlesse chavire au Ninkasi Kao dans une soirée Divine textotement "Superbe programmation. Musicalement terrible. C'est injuste pour Céline et Malik qu'il n'y ait pas eu plus de monde." Pendant qu'elle dégustait la fureur électro de Whitey, je mimais un bed potatoes abruti devant mon téléviseur déformant. Du traditionnel marquage de points en final du concours de l'Eurovision, je clignais des paupières avant la mire. Dimanche, un feuilletage de la Constitution européenne n'encourage pas à une survitalité. Je voterai "blanc" bien que ma dernière discussion "d'humanité" avec Serge Dorny me pousse peut-être à basculer dans le camp du "oui". Uniquement pour lui faire plaisir. En bon petit électeur, j'ai toujours voté. Mais souvent, trop souvent, sans ferveur, voire à contre-c¦ur (remember "Jacques Chirac à 82 % en 2002"). À trop forcer le civisme, ce devoir fade et sans espoir de l'isoloir, on va bien finir par la tuer, notre belle démocratie. À trop jouer avec la peur mensongère, à trop ignorer les signaux de fumée noire sortis des derniers scrutins nationaux, nos dirigeants vont bien finir par la tuer, notre pas si belle démocratie. Alors, oui, bon bourrin, j'irai voter. Comme d'habitude. Fermez les paupières en éternuant.

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MERCREDI 01 JUIN 2005 _ #327
 

Les malheurs des uns

"Bien fait pour sa gueule", s'affranchit, d'un sourire jubilatoire, un cultureux en doigts sur des petits fours. Jeudi, nos langues de vipère imbibées de champagne glissent sur les déboires du couple Sarkozy lors de la présentation du festival Jazz à Vienne aux Subsistances. La veille, nous apprenions les causes de la crise conjugale infligée au couple présidentiable made like in USA et échafaudions des romances loufoques : "Il est peut-être parti avec Alliot-Marie." Sous la verrière de la cour carrée, Isabelle Dejeux et Thierry Pras d'infoconcert.com débattent de cette déontologie française imposant de ne rien dévoiler des affaires privées de nos gouvernants (les mêmes qui jouent avec leur intimité familiale pour vanter leur quotidien d'heureux citoyens modèles) alors qu'une simple connection sur un site helvétique donne tous les détails poilants de l'affaire (www.lematin.ch). Clignez des paupières. À demi chauffés par une rinçade de coupettes bulleuses, nous flashgordons au Café 203 où Cécile Paris Chaffard pose, à la vue de Cart One et Christian Jeulin, son portable serti de faux diamants et envisage ses prochains one-shots sexuels avec gourmandise. Lorsque le staff des Nuits Sonores rallonge notre table sous une lune radieuse, Emma et Vincent Carry décident d'une prochaine "boum" sous-titrée A Tribute to Eddy Barclay. "Tout le monde devra être habillé en blanc et P. Moore se mettra dans la peau d'Eddy", prévient la journaliste avant de se tourner vers son "petit ourson" : "Dis, mon chéri, si je devenais blanche, tu m'aimerais toujours ?" Clignez des paupières. Agoria accepte de mixer Barbara avec les variétés signées par le défunt tropézien tout en rechignant à porter un collant blanc "moule-burnes" lors de cette future fête et refusant toujours à confirmer "qu'il a une bite grosse comme une bouteille d'un litre et demi de Coca", selon les dires incertains de Cécile Paris. En service au bar, Jérémy répond à ma drague par sourires et encouragements. Le beau gosse décroche rapidement le grade de l'allumeur qui ne passera jamais à l'acte mais aime séduire pour se rassurer. Clignez des paupières. En grignotage nocturne dans un canapé d'angle du Couleur Café, l'alcool excède nos grandiloquences en politique générale et fictions particulières. Vincent interrompt un petit verbe pour "écoutez ! Ah, Rod Stewart. Trop grand, Rod Steward", tandis que le jour se lève gris-bleu hors de ce paradis en fontaines kitsch et lampes en cul de bouteille. Clignez des paupières. Dimanche, mon vote dérape. J'étais partisan du "Blanc" puis du "Oui". Je glisse le "Non" dans l'enveloppe et refuse ainsi de répondre à la question posée. Pas par rejet populiste de l'Europe. Pas par adhésion aux gangs fachos et alternos déjà coauteurs du 21 avril 2002. Simplement, férocement, pour marquer mon dépit face à une classe politique, et à ceux qui la commentent, n'ayant toujours pas compris la refonte générale exigée par l'accident terrible survenu lors de la dernière élection présidentielle. Fermez les paupières, un peu honteux mais toujours en conscience.

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MERCREDI 08 JUIN 2005 _ #328
 

Couper la frange

Sa mâchoire mord à plein dans la montée progressive du monumental Sky was pink de Nathan Fake. Sa tête dévisse l'attitude du club kid hypnotisé par le rythme et souriant à ses cristaux de MDMA. Ses épaules roulent comme une maniérée en centrifuge sur un gigadancefloor pour teenagers anglais. Mercredi, sur un podium sonoré par Sex in Dallas, le danseur-chorégraphe Alexandre Roccoli transpire toutes les gestuelles du raver enrôlé par les beats électroniphiés. La création Ersatz (When was the last time you sweat on a dancefloor ?) intègre l'énergie et les codes de la danse en disco sans les déplacer vers un discours libre. Les références et jeux de corps sont nombreux mais n'affectent en rien notre rapport à la danse impulsive. Clignez des paupières. Dans le vert tendre du jardin de la Villa Gillet, nous croquons dans un sandwich et observons les hommes tonsurés. La Drôlesse organise son départ avancé pour Sonar avec Franck d'Electroclust et imagine déjà une sex affair avec le danseur, "typiquement le genre de bear qui se dépoile dans Butt magazine". Clignez des paupières. Cécile Paris Chaffard se poste en bas des marches du nouveau théâtre des Célestins. Le son cuivré de saxophones et trombones souffle sur le bassin de la place et sème des bras couplés dans un parterre de valses. Un regard depuis le balcon et nous forçons la visite du bâtiment rénové à l'ancienne. Seul un lustre horrible de modernité pendouille au centre du hall d'entrée. "On dirait la version géante d'une boucle d'oreille vendue sur un marché", plaisante une invitée. Clignez des paupières. Dehors, Gaelle Communal m'enlace et réitère l'invitation à son prochain mariage annoncé comme totalement vavavoum. Cheveux mi-longs avec effet du suburbian pas gominé, Christian d'Aubarède pose condition stupide pour me "montrer (sa) queue" tandis qu'un frêle gentilhomme s'immobilise à mes pieds, fixe ma bouche calme avant de s'enfouler sur la place sans piquer mot. "Lui, si tu n'en veux pas, je suis preneuse", sursaute Cécile Paris. En fond de bar, la compagnie Là Hors De calcule le nombre de drinks nécessaire à un taux de dignité proche de zéro. Patrice Béghain se face d'un faux air féroce avant de partir dîner avec Gilles Pastor et Pierre David. "Tu veux que je te ramène quelque chose de Taïwan ?" questionne Isabelle Moulin, toujours lumineuse de tendres gentillesses. "Oui, un gadget qui brille et bouge tout seul", cligné-je des paupières. D'une hilarité suspecte, Gérard Collomb débute son intervention lors de la présentation de la prochaine Biennale d'art contemporain d'un "j'ai éteint mon portable, certain que je ne suis pas ministrable". Jeudi au fort Saint-Jean, nous écoutons sagement les deux commissaires de cette "Expérience de la durée" (appellation de l'édition 2005) vanter des artistes majoritairement "baba". Sans prématurer de la qualité des accrochages annoncés, cette Biennale respire très fort l'air du temps qui consacre et recycle le psychédélisme pré-68. Quel ennui, la mode du présent. Clignez des paupières. Au cocktail post-conférence, sur une terrasse scellée à la colline, le soleil coagule le sang de nos veines. Pour survie, nous fluidifions le rouge par injection massive de bulles jaunes et initions un concours général de dires à vue chargés en saloperies gratuites. "Si vous gerbez sur tout le monde, ça m'intéresse", sourit Isabelle Bertollotti. Dans la peau d'impossibles stars, Emma, Super Pénélope et Cécile Paris font les crâneuses. Pierre Budimir nous rejoint afin de gagner le pari du plus long métrage de coupes de champagne vides. Pari perdu, de justesse, au regard des cadavres sur pied siphonnés par nos voisins de Là Hors De. Clignez des paupières. Entre deux bacs à shampoo, un dj mixe electroclash. Chez Comédi, la frange est nette et remonte le front bien haut. Proche de l'indignité, nous tentons l'expérience du cocktail capillaire dans le salon blindé d'amis de la coiffeuse sur lequel glissera Thomas Charrondière (photo). François Kanardo sirote une sangria à la fraise Tagada avant d'être invité à sortir du lieu pour incompatibilité d'attitude. Je mime la fashionista des campagnes et abuse des "Oh my god ! Oh my god !", une fleur plus très fraîche à l'oreille. Clignez des paupières dans les bras d'un trop jeune amant sans importance. Samedi, l'écoute abusive d'Our House par International Pony souligne mon état : les nerfs qui tiraillent le corps dans des mouvements brutaux, serrent mon gosier à ne plus manger et refusent que la chair ne se repose. Clignez des paupières. Aux Subsistances, La Drôlesse et Super Pénélope sortent indemnes d'Incubator, pièce de danse présentée par Philipp Gehmacher. Pourtant, l'approche minimaliste faite par le chorégraphe, construite dans un faux vide sur la relation interpersonnelle et ces gestes tendus, retenus et appuyés, me colle à la tête. En diversion, nous fermons les paupières dans un souper froid en plein air et espoirs d'hommes qui ne viendront pas.

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INSTINCT NOCTURNE

Écrit par Baptiste Jacquet
a été publié sous l'appellation
"Nuits Mobiles" jusqu'au
22 nov. 06 dans l'hebdomadaire

 

 

 

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